En finir avec le Mal Logement ( 23 03 10)

Hebdomadaire LA VIE                  Social

Pour en finir avec le mal-logement

La fin de la trêve hivernale des expulsions locatives ravive les critiques sur les carences de l'Etat, garant du récent droit au logement.

 

Face à une situation jugée "gravissime", un front uni et inédit s'est constitué, réunissant plus de 60 associations de locataires (CNL, CSF), de défenses des sans-logis et des mal-logés (Dal, Fondation Abbé Pierre, ATD Quart-Monde, Croix-Rouge, etc.) et de syndicats soutenus par les partis de gauche. Ces associations ont demandé aux pouvoirs publics un moratoire des expulsions. La plupart touchent des familles reconnues "prioritaires" par les commissions du droit au logement opposable (Dalo). "L'Etat déloge alors qu'il doit reloger selon la loi, c'est un scandale qu'on ne peut laisser perdurer", affirme Paul Bouchet, ancien président d'ATD Quart-Monde et membre’’du’’comité-de-suivi-du-Dalo.

Depuis le 16 mars, des dizaines de milliers de personnes incapables de payer leur loyer sont redevenues expulsables sur l'ensemble du territoire national. "La situation est pire qu'avant la fin de la trêve", souligne Serge Incerti, président de la Confédération nationale du logement (CNL). "Tous les indicateurs sont au rouge, tous les ingrédients sont là pour que 2010 soit encore plus difficile", renchérit Jean-Baptiste Willaume de la Confédération syndicale des familles (CSF). Et les chiffres ont de quoi inquiéter. Tous les indicateurs sont à la hausse, qu'il s'agisse des décisions de justice prononçant l'expulsion, 105 271 en 2008 (+ 25 % depuis 2002), des demandes de concours de la force publique, 41 054 en 2008 (+ 7,6 % depuis 2002) ou des expulsions effectives avec intervention de la force publique, 11 294 en 2008(+50%’’depuis’’2002).

"Lutter contre le mal-logement, c'est l'affaire de l'Etat, mais c'est aussi l'affaire des citoyens", estime l'ancien ministre Roger Fauroux, dans une interview que publiera l'hebdomadaire La Vie dans son numéro du 25 mars. Avec Bernard Devert, prêtre et fondateur de l'association Habitat et humanisme, qui gère près de 4 500 logements sociaux dans toute la France, il vient de publier "En finir avec le mal-logement. Une urgence et une espérance" (Cerf). Un ouvrage collectif dans lequel il défend une nouvelle vision de l'habitat et du "vivre ensemble" comme un remède à la crise. Car pour Roger Fauroux, le problème n'est pas seulement financier. "Les collectivités publiques ont dépensé plus de 35 milliards en 2008, en intégrant les aides fiscales. On a beaucoup construit, mais pas forcément là où c'était le plus nécessaire, ni en faveur des personnes les plus précaires. Il faudrait reconquérir le parc inutilisé dans les villes. Cela éviterait, en outre, de constituer de nouveaux ghettos’’et’’favoriserait’’la’’mixité’’sociale."

Pour l'ancien ministre, le mal-logement n'est pas une fatalité et sa solution dépend aussi de chacun d'entre nous. "Sommes-nous prêts à partager nos espaces de vie ? Sommes-nous prêts à accueillir dans nos centre-villes des populations socialement défavorisées ? Avec Habitat et humanisme, nous sommes souvent en butte à des associations de riverains qui refusent de voir des logements sociaux s'ouvrir dans leur quartier. C'est une honte. La fin du mal-logement n'est pas qu'un problème de volonté politique. C'est aussi une question posée à tous les citoyens."

C'est dans cet esprit que le collectif des Morts de la rue vient de lancer une campagne originale en faveur des logements sociaux. Avec le soutien d'Amnesty International, du Secours catholique et d'ATD Quart Monde, ce collectif propose à chaque citoyen d'adresser une lettre à son maire pour lui demander que sa commune fasse place aux personnes disposant de faibles revenus. "Je souhaite habiter une commune où vivent ensemble des familles de tous milieux, et je me réjouirais d'accueillir des voisins enfin sortis d'une situation d'errance ou de logement précaire", peut-on lire dans le modèle de lettre mis à disposition du public, et que vous pouvez télécharger en bas de cet article. "Peut-être entendez-vous les échos de personnes inquiètes de projets de logements sociaux à proximité de chez eux. C'est pourquoi je tenais à me manifester pour témoigner que des personnes, parmi vos administrés, se sentent solidaires des familles en difficulté."

Certains se voient aussi refuser l'attribution d'un logement en raison de leur origine réelle ou supposée, ou de leur nationalité. Saisi par la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (Halde), le Tribunal correctionnel de Saint-Etienne a rappelé l'an dernier le caractère discriminatoire des pratiques d'attribution fondées sur un "plan stratégique de peuplement", prenant en compte l'origine ethnique des demandeurs, en condamnant un bailleur social pour discrimination raciale. Fort de cette décision, la Halde a exigé la mise en place de procédures transparentes pour traiter les candidatures et l'attribution des logements. Elle a aussi appelé au respect de l'obligation d'atteindre un minimum de 20 % de logements sociaux pour les communes de plus de 3 500 habitants

La lettre du collectif Morts de la rue

Téléchargez la lettre pour l'envoyer au maire de votre commune (au format DOC / au format PDF)
Envoyez une copie aux comités "Solidaires pour les droits" par courrier au 33 rue Bergère 75009 Paris ou par
e-mail : pourlesdroits@atd-quartmonde.org
N'hésitez pas à diffuser un maximum cette lettre à votre entourage ou à vos réseaux...

 

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